Quand vous aurez fini de lire ma prose, vous vous demanderez comment je conserve ma foi en Dieu. Je dois vous dire que la foi est un don de Dieu et que ce don est solide. Comme Dieu me le demande, je prie pour mon frère qui fut tenté par Satan et ne résista pas.
Si ma foi n'est pas altérée, je pense qu'il n'en est pas de même avec certains autres et je prie pour eux aussi, pour que leur foi ne dépende pas du comportement de leurs voisins. Je crois pas en Dieu non pas à cause des autres; je crois en Dieu à cause de Dieu lui même.
Si j'essaye d'avoir un bon comportement et d'aimer mes frères, c'est pour faire naître en tous l'amour des autres. Aimer les autres c'est aimer Dieu. J'aurais aimé rencontrer plus de Mgr O. Romero et moins d' A.D. mais cela finira par venir.
L'exemple ci dessous montre que chacun, nous sommes tentés pas Satan ...
Matthieu 23:1-12
Jésus, parlant à la foule et à ses disciples, dit:
Les scribes et les pharisiens sont assis dans la chaire de Moïse.
Faites donc et observez tout ce qu'ils vous disent; mais ne faites pas ce qu'ils font: ils disent mais ne font pas.
Ils lient des fardeaux pesants, et les mettent sur vos épaules, mais ils ne veulent pas les remuer du doigt.
Ils font toutes leurs actions pour être vus des hommes. Ainsi, ils portent de larges phylactères, et ils ont de longues franges à leurs vêtements;
ils aiment la première place dans les festins, et les premiers sièges dans les synagogues;
ils aiment à être salués sur les places publiques, et à être appelés par les hommes Monseigneur, Emminence !
Mais vous, ne vous faites pas flatter ainsi; car un seul est votre Maître, et vous êtes tous frères.
Et n'appelez personne sur la terre votre père; car un seul est votre Père, celui qui est dans les cieux.
Ne vous faites pas appeler directeurs; car un seul est votre Directeur, le Christ.
Le plus grand parmi vous sera votre serviteur.
Quiconque s'élèvera sera abaissé, et quiconque s'abaissera sera élevé.
Médecin du Pape et des fils à placer ...
Nous avions terminé notre déjeuner à la cantine de l'hôpital et prenions un petit café au bar du cercle des étudiants à la maison Médicale.
Jean Marie fut président de ce cercle pendant plusieurs année, j'étais l'un de ses copains. Jeunes médecins, nous venions d'être diplômés. Nous commencions tous deux une carrière universitaire. Nous avions un peu de "cafard" au souvenir du bon temps où nous étions de simples carabins. Jean Marie s'orientait vers la clinique, je préférais les sciences fondamentales. nous étions tous deux considérés à la fois comme des "grandes gueules" et de bons éléments. Notre amitié reposait sur un passé commun. Je suis très, très vieux et Jean Marie est mort depuis longtemps ... Mgr A.D. aussi, d'ailleurs.
Je survis pour la grande joie des uns et la tristesse des autres ...
Nous étions membres d'équipes d'action catholique. Notre aumônier était un jésuite, chose assez rare à l'université catholique: en général les jésuites en étaient exclus. Le clergé séculier se méfie des Ordres où l'on fait voeux de pauvreté.
Au Vatican aussi ils luttent contre la pauvreté, avez-vous déjà vu un cardinal pauvre...
Puisque nous étions de bons éléments, notre avenir académique était tout tracé, mais, comme étions aussi de "Grandes gueules", nos relations avec le Haut Clergé local étaient parfois assez tumultueuses, en bref, nous étions des "emmerdeurs", des sortes de Don Quichottes. Nous compliquions des choses qu'une simple obéissance auraient rendues si simples.
Si nous n'étions pas amis dès le début, c'est parce que nous ne nous connaissions pas. Lors de sa mort, Jean Marie dirigeait le service de cardiologie pour adultes et enseignait aussi la chose. Mais il fut jeune d'abord ... moi aussi !
Nous étions très différents l'un de l'autre: Jean Marie était fin et diplomate, alors que j'avais un abord assez rugueux. Ma diplomatie était assez rudimentaire et dépassait de peu l'usage de la grenade et du bazooka, dont j'usais et abusait d'ailleurs or je tirais juste! On ne me fréquentait pas trop, car on me craignait. Mes relations avec les étudiants était par contre très bonnes, je frappais toujours vers le haut jamais vers le bas.
Je me demande bien si on ne me traîta pas de "sale communiste" ...
Notre amitié était indissoluble. Nous avions réalisé plusieurs opérations et elles avaient toujours parfaitement bien réussi. Nos discussions étaient parfois orageuses, mais elles se terminaient toujours de façon très amicale.
Familialement aussi nous étions très liés, et nos enfants s'entendent toujours fort bien. La femme de Jean Marie avait fait de brillantes études médicales, mais se consacrait à ses enfants. La mienne se spécialisait en Médecine Interne. J'étais en plus devenu une sorte de "papa poule".
Nous prenions nos repas à l'hôpital, mais souvent nous revenions au bar du cercle étudiant pour prendre le café et discuter avec les étudiants.
Le président actuel entra. Nous voyant attablés, il vint nous saluer. Après un court bavardage il nous décrivit son problème. Sept, parmi les "bons" éléments de dernière année, venaient de recevoir un pli recommandé académique, les avertissant qu'ils ne pouvaient pas passer leurs examens de fin d'études: il avaient été absents plus de trois fois au cours clinique du Professeur H.
H. était un homme illustre, un grand clinicien, maintenant il était devenu un peu gaga. Il était devenu politiquement très puissant et on disait qu'il était "médecin du Pape". Ses absences fréquentes s'expliquaient peut-être par un trop grand intérêt pour la santé pontificale.
Jean Marie et moi n'allions jamais à ses cours. Le professeur H ne les préparait d'ailleurs pas, et pour nous aider à nous reposer, ils nous parlait de son rôle d'expert des tribunaux lors de l'affaire Softenon, vous savez, ce somnifère qui avait été mis sur le marché sans être testé. ce médicament qui avait produit tant d'anomalies congénitales. Il nous décrivait les nombreux cas de phocomélie découverts dans le pays ... mais il parlait fort peu de l'objet de son cours, la clinique. Le problème du "Softenon" et des médicaments non testés devait être traité en pharmacologie et sûrement en politique, mais pas en clinique !
Pour votre gouverne, je m'occupais aussi de politique de santé, peut-être trop à gauche ...
H savait que nous ne fréquentions pas ses cliniques, mais il savait aussi que nous étions des grandes gueules, or il préparait une action secrète qui aboutirait à la nomination d'un de ses fils à l'Université. Il se taisait donc !
Visite aux puissants de ce monde
Les sept étudiants avaient donc décidé de ne pas dormir à cette clinique, mais d'améliorer leur formation psychologique. Ils participaient à des séminaires de psychologie pour médecins, pour améliorer les relations avec leurs futurs patients. Nous admirions cet effort, nous qui au lieu d'aller au cours restions simplement dans notre lit, bien au chaud.
Progressivement se réveillait en nous le Don Quichotte qui était à la base de notre action passée. Nous devions faire quelque chose.
Jean Marie proposa d'aller chez le Recteur pour lui demander d'intervenir. Mordu moi aussi par l' "amour sacré" de l'action, j'ajoutai qu'il fallait d'y aller de suite. Le président du cercle tenta de refroidir notre élan, nous rappelant que le Mgr était vendu au système et que le vieux "H" était "médecin du Pape " de l'époque. Il ne voyait pas bien comment un Mgr oserait s'opposer à un homme qui avait de telles relations pontificales.
Le Mgr avait peut-être une calotte rouge, mais il n'était pas aussi bien "chapeauté" que le professeur "H" !
Ayant décidé d'y aller, nous n'écoutions plus rien, nous nous levâmes pour nous diriger de suite vers les "Halles Universitaires" où se trouvait le bureau rectoral.
En cours de route, la pensée de Jean Marie s'éclaircit et il planifia son intervention. Il me demanda de le laisser parler, me rappelant mon manque total de diplomatie. L'opération était délicate et je savais qu'elle pouvait échouer même si je ne mettais pas les pieds dans le plat. Je savais que mon sens de la diplomatie ne dépassait pas l'usage de la grenade ou du bazooka, et lui promit donc de me taire.
Aux Halles Universitaires, nous avons demandé un rendez-vous rectoral au jeune séminariste de garde. Il alla dans le bureau du Monseigneur. Il ressortit rapidement nous demandant de le suivre. Son excellence nous recevrait de suite.
Audience chez le Prince-Evêque
Nous sommes introduits dans une salle somptueuse, le Monseigneur se leva. Il avait une belle soutane noire présentant une seule rangée de petits boutons plus ou moins rouges et une calotte de même couleur. Une large ceinture rouge moulait un bedon majestueux. Il nous invita à nous enfoncer dans des fauteuils confortables en cuir brun clair. Les fauteuils étaient tellement larges que nous aurions pu n'en utiliser qu'un pour deux. Les accoudoirs étaient à la fois gigantesques et plats, sans doute pour accommoder les énormes cendriers sur lesquels se déposaient les Havanes canoniques ou les verres de cognacs académiques. Si j'avais su, gosse, j'aurais écouté mon père et mangé davantage pour atteindre plus tard le calibre requis. Je n'avais sans doute pas la vocation.
Le Mgr par contre s'était nourri plus copieusement et avait atteint des proportions plus conformes à la taille du mobilier du rectorat.
Tout le monde venait de s'asseoir.
Comme promis, je mis en poche mes outils de dialogue et admirai la pièce, pendant que le Mgr écoutait Jean Marie lui expliquer le problème. La pièce était disposée comme la scène de ce théâtre de Metz où je jouais du Racine ou du Corneille ... Je dus brutalement cesser d'admirer les vitraux, car le monseigneur venait de se lever. D'un geste théâtral du doigt il nous indiqua la porte: il nous "foutait" proprement dehors. Cela faisait un peu Chef du Sanhédrin et je voyais déjà la lapidation de mon ami ... Je me demande s'il n'y avait pas en plus un bûcher prêt sur le "Oude Markt et un capucin, le briquet allumé en main ...
Le Cardinal Joseph Malula de Kinshasa vécut sans doutes des choses semblables à Rome ... Je comprend aussi pourquoi Martin Luther cessa de causer à ce beau monde ... Je plains le Pape entouré de cette bande de Fauves: un petit agneau tout blanc face à une horde affamée. Avec quelques clous, il auraient vite réglé le compte du Christ.
C'était le moment de saisir mon Bazooka. Mais, je me souvins de ce que j'avais promis à Jean Marie. Pour me stimuler encore davantage, le recteur me rappela que je devais de l'argent à l'Université. J'ai porté la main à ma poche mais "arrêtais au souvenir de la promesse faites à Jean Marie. Je subit silencieusement cette tentative de chantage.
Le dialogue catholique: le pot de terre contre le pot de fer !
La partie était perdue. Allions nous nous laisser écraser ou allions nous réagir ... La carrière de Jean Marie dépendait du bon vouloir du Mgr. La mienne était intouchable, je dépendais directement de l'Etat. Le Gouvernement n'était pas catholique ... Mes amis non plus d'ailleurs, ils se demandaient ce que je faisais chez ces fauves !
Je me pose le dilemme de la "juste guerre" défendue par certains théologiens et la politique de "l'autre joue" proposée par le Christ. La politique de "l'autre joue", celle du pacifisme me tente quand même fort. Les contraires s'attirent
De retour à la Maison Médicale, nous avons décrit notre aventure au président. Celui-ci en fit une affaire personnelle: il voulait nous venger. Il saisit son téléphone et appela le Recteur. Il lui dit que si une décision favorable aux étudiants n'était pas prise "sur l'heure", demain il y aurait grève de tous les étudiants et que de ce pas il allait convoquer la presse.
Le Mgr dit que le problème serait réglé de suite et le supplia de ne pas feire de grève ni convoquer la presse. Souriant, le président nous rappela que rien ne valait la force. Je caressait mes grenades en souriant moi aussi ...
Le dialogue entre chrétiens
Jean Marie avait raison: la force pure que ce soit celle du Mgr , celle du président, ou celle de mes grenades faisait un peu société primitive, âge de la pierre ! Nous devrions dialoguer d'une façon plus évangélique. Les armes, c'est bon pour des sauvages comme Le Mgr et moi-même.
Je comprend pourquoi Martin Luther à refuser de s'incliner devant ces gens. Je ne suis pas sorti de l'Eglise, et je n'en sortirai pas ! Je plains cependant le pauvre Pape François qui doit fréquenter quotidiennement de tels gens. Je ne raconte pas l'aventure pour remettre la foi du lecteur en question. Contrairement à ce qu'on nous raconte parfois, le mal n'est pas ailleurs, il est ici dans l'Eglise. Jamais le Christ n'a critiqué l'empereur à Rome, mais relisez plutôt ce qu'il disait sur les prêtres et scribes, Or les Mgr, c'est quoi, sinon des Grand Prêtres ?
Il serait temps que l'Eglise décide de dialoguer !
Quand vous voyez ces gens, vous comprenez les arhées. Je souris quand j'entends un cardinal ou un pape dire du mal de Karl Marx, de Che Gevara ...